Françoise Amirghasemi, 12/2012

 

Évolution du droit international de l'environnement
et instruments juridiques marquants dans ce domaine

 

[1930–2002]

 

 

          Le droit international de l’environnement est relativement récent, mais l’on peut remonter aux années 1930 et 1940 pour trouver les premières manifestations d’une préoccupation commune quant à l’écologie, avec la Convention relative à la conservation de la faune et de la flore à l’état naturel, adoptée à Londres le 8 novembre 1933, et la Convention pour la protection de la flore, de la faune et des beautés panoramiques naturelles des pays de l'Amérique, adoptée à Washington le 12 octobre 1940 (entrée en vigueur le 1er mai 1942). Après la Deuxième guerre mondiale, plusieurs commissions internationales ont été mises en place en Europe pour contrôler la pollution des eaux (Moselle, Rhin, Lac de Constance et Lac Léman). Le 12 mai 1954, à Londres, était adoptée la Convention internationale pour la prévention de la pollution des eaux de la mer par les hydrocarbures, modifiée les 12 et 15 octobre 1971, respectivement, par deux Amendements (le premier portant sur la protection du récif et la Grande barrière, et le second sur la disposition des soutes les limites à la grandeur des soutes). Enfin, le Traité sur l’Antarctique, conclu à Washington le 1er décembre 1959, a conféré à ce continent un régime international unique en son genre: conclu entre tous les États qui avaient exprimé des revendications de souveraineté en Antarctique, et les États qui refusaient de reconnaître ces revendications, il est considéré comme ayant gelé ces revendications (en application de son article IV) et ayant institué un régime de coopération internationale qui place à égalité tous les États parties.

 

          Le droit international de l’environnement prend également sa source dans la jurisprudence internationale. On peut citer à cet égard la sentence arbitrale rendue dans l’affaire de la Fonderie de Trail, en 1941, l’arrêt rendu le 15 décembre 1949 par la Cour internationale de Justice (CIJ) dans l’affaire du Détroit de Corfou (Royaume-Uni c. Corfou), l’avis consultatif de la CIJ rendu en 1996 sur la licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, ou encore l’arrêt rendu le 25 septembre 1997 par cette même cour dans l’affaire Gabčíkovo-Nagymaros (sur le litige entre la Hongrie et la Slovaquie concernant la construction de barrages sur le Danube).

 

          S’ensuit, vers la fin des années 1960, une émergence de la conscience écologique, qui culmine avec la tenue, en juin 1972, de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement, dite «Conférence internationale de Stockholm», à l’issue de laquelle a été adoptée la Déclaration de Stockholm, texte phare dont les 26 principes ont orienté toute la réflexion et l’action des deux décennies qui ont suivi. La Conférence a également produit un Plan d’action pour l’environnement et abouti, sur recommandation de la Conférence, à la création en 1972 du Programme des Nations pour l’environnement (PNUE). Durant la période qui s’est écoulée entre la Conférence de Stockholm (1972) et la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développementConférence de Rio»), tenue en 1992, plusieurs instruments réglementaires ont été adoptés selon une approche sectorielle, dans les quatre grands domaines de l’environnement, à savoir les océans, l’eau douce, l’atmosphère et la biodiversité. Ainsi, la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, adoptée le 10 décembre 1982 à Montego Bay (Jamaïque), qui instaure un régime international complet et détaillé sur le milieu marin; la Convention sur le droit relatif aux utilisations des cours d'eau internationaux à des fins autres que la navigation, adoptée le 21 mai 1997, mais qui n’est toujours pas entrée en vigueur (il manque encore à ce jour six ratifications); la Convention de Vienne pour la protection de la couche d’ozone, adoptée le 22 mars 1985 (entrée en vigueur en 1988), complétée par le Protocole de Montréal (1987), et la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (1992), complétée ultérieurement (1997) par le Protocole de Kyoto; ou encore la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, adoptée le 3 mars 1973 à Washington (entrée en vigueur deux ans plus tard).

 

          Sur le plan intersectoriel, l’on s’est préoccupé de réglementer les sources potentielles de dommages environnementaux, en s’attachant aux produits toxiques ou dangereux sur l’ensemble de leur cycle de vie (production, transport, commercialisation et élimination). Le PNUE, par exemple, a mis en place un Registre international des substances chimiques potentiellement toxiques et, le 22 mars 1989, a été adoptée la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination.  En 1992, les trois Conventions de RioConvention-cadre sur les changements climatiques, Convention sur la lutte contre la désertification et Convention sur la diversité biologique – ont été adoptées dans la foulée du Sommet "Planète Terre" (Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement) tenu à Rio en juin 1992. Chacune constitue un moyen de contribuer aux objectifs énoncés dans le Programme d’action pour un développement durable (dit «Action 21»); les trois instruments sont étroitement liés et portent sur des questions interdépendantes. Enfin, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a adopté diverses conventions en matière d’activités nucléaires, notamment la Convention sur la sûreté nucléaire, adoptée en juin 1994.

 

          Une étape marquante de l’évolution du droit international de l’environnement est la Conférence de Rio, mentionnée plus haut. La Déclaration qui en est issue vient, en 27 principes, confirmer les dispositions de la Déclaration de Stockholm de 1972, mais s’en distingue par la notion – centrale - de développement durable, qui intègre développement économique et protection de l’environnement. Elle innove aussi en ce sens qu’elle prévoit d’associer le public en lui reconnaissant un droit d’information, de participation et de recours pour toutes les questions d’environnement. Après la Conférence de Rio, aucun accord multilatéral majeur relatif à la coopération économique n’a omis de désigner la protection de l’environnement comme l’un de ses objectifs; ce fut notamment le cas de l’Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce (dit «Accord de Marrakech»), en 1994. Par la suite, la Déclaration du Millénaire pour le développement adoptée en 2000 a, via les objectifs du Millénaire pour le développement qui y sont énoncés, entériné les principes de développement durable d’Action 21 tout en les précisant. Lesdits objectifs servent d’indicateurs des progrès qu’il convient d’accomplir à l’horizon 2015. En 2002, lors du Sommet mondial pour le développement durable tenu à Johannesburg, a été adoptée une Déclaration qui consacre le développement économique, le développement social et la protection de l’environnement en tant que piliers du développement durable, interdépendants et qui se renforcent mutuellement.